03.11.2022
Face à des épisodes traumatisants de crues à répétition, les élus du bassin versant Brévenne-Turdine, au nord-ouest de Lyon, se tournent vers le Syndicat des rivières, le SYRIBT, pour mettre en place un double dispositif : une chaîne de vigilance étendue aux citoyens en tant qu’observateurs de terrain, le réseau « sentinelles », et un système automatisé de surveillance de la hauteur des cours d’eau. Coup de projecteur sur cette initiative lancée il y a plus de 10 ans.
Sur le bassin versant Brévenne-Turdine, situé au nord-ouest de Lyon, les archives témoignent d’une histoire marquée par des inondations récurrentes, violentes et rapides, des épisodes de crues torrentielles. La zone la plus touchée est l’agglomération de l’Arbresle/Sain-Bel à l’aval du bassin versant, à la confluence des deux bassins versants Brévenne et Turdine. La Brévenne particulièrement sensible aux événements de forte pluie dits « cévenols » peut voir son débit le plus bas être multiplié par 300 : c’est la crue centennale.
En 2008, suite à des pluies peu abondantes mais constantes, les sols sont saturés en eau et l’une de ces crues se produit. La montée des eaux est très rapide, de l’ordre de 5-6 heures avec un débit supérieur à la crue centennale. L’alerte officielle de la Préfecture du Rhône basée sur les outils prévisionnels de vigilance Météo ne permettent pas d’anticiper suffisamment et ne sont donc pas actionnés à temps. Les dégâts sont considérables, affectant les habitations, les véhicules, les commerces, les artisans, les voiries.
C’est à la suite de cet épisode traumatisant pour tous que les élus du bassin versant Brévenne-Turdine décident de s’inspirer d’une initiative déployée dans le bassin voisin de l’Azergues, où une chaîne d’information entre élus a été mise en place. Ils se tournent alors vers le syndicat de rivières, le SYRIBT,et lancent dès 2009 un double dispositif de vigilance, basé sur un réseau de « sentinelles » et un système automatisé de surveillance de la hauteur des cours d’eau, ayant pour objectif d’aider le maire à prendre ses décisions.
Le principe du réseau de « sentinelles »: créer une chaîne d’alerte humaine, partant d’observateurs situés sur le terrain, au bord des cours d’eau, qui alertent leurs élus communaux. Ces sentinelles sont des citoyens volontaires endossant une mission de surveillance des cours d’eau dès l’amont du bassin versant, et s’appuient sur l’implication d’élus.
Création d’une chaîne d’alerte
La « sentinelle » surveille la montée du niveau de « son » cours d’eau et lorsque celui-ci atteint la cote de vigilance ou d’alerte, elle prévient son élu référent (maire ou adjoint) et le syndicat de rivières Brévenne-Turdine. L’élu répercute alors l’information sur les communes plus en aval. La mise en vigilance se transmet depuis l’amont jusqu'à l’aval, en passant par les centres de vigilance (communes du bassin très touchées par les inondations) qui constituent les centres névralgiques de la chaîne. Et c’est ainsi qu’une chaîne d’alerte s’organise, donnant lieu au déclenchement des actions prévues d’une part pour maîtriser l’événement et d’autre part pour protéger les populations.
L’idée avec le réseau "sentinelles" est de profiter de la mémoire des riverains, qui ont tous une très bonne connaissance de la rivière et des évènements passés.
Betty Cachot, directrice du Syndicat des rivières Brévenne et Turdine
L’importance du facteur humain
Pour Jean-Michel Cellier, habitant de Saint-Romain-de-Popey, retraité et sentinelle citoyenne, c’est bien la connaissance du lieu où il a passé sa vie et toutes ces années pendant lesquelles il a été témoin des phénomènes de crues à l’Arbresle, qui lui permettent d’être acteur et de contribuer à cette chaîne de solidarité.
Ceci explique le choix de positionner les échelles et repères de niveaux au plus près des volontaires.
Aujourd’hui, le réseau compte 120 sentinelles, élus et bénévoles, et doit relever le défi d’entretenir la motivation de ses sentinelles et de démontrer aux élus l’intérêt de ce dispositif. Ce qui n’est pas chose facile lorsque les événements extrêmes ne se produisent pas à une fréquence soutenue.
Ce travail de réappropriation de la rivière a été accompagné de quelques chantiers de réaménagement des berges pour une meilleure expansion des crues là où le risque est moindre (terrain de foot, etc.), de formations des élus et volontaires à l’exercice.
Une réflexion est maintenant engagée sur la diversification des missions à confier à ce réseau de sentinelles qui pourraient concerner la surveillance des pollutions ou des berges (végétation invasive, arbres morts…). Et pourrait intégrer la valorisation et la capitalisation autour des non-événements, c’est-à-dire de tout ce qui a été mis en place et a permis d’éviter le pire.
Journée Adaptation au changement climatique, l'Arbresle, 20 octobre 2022
Une Journée de terrain sur le thème de l’adaptation au changement climatique, consacrée à la prévention des risques critiques, s’est déroulée le 20 octobre à l’Arbresle, à une trentaine de km à l’ouest de Lyon.
Au programme : déambulation dans ce bourg de 6310 habitants, à la confluence de la Brévenne et de la Turdine, et présentation du réseau « sentinelles » ; retours d’expériences sur la remontée d’informations du terrain en matière de prévention des risques d’avalanches dans la vallée de Chamonix et de feux de forêts dans le Var ; présentation de deux dispositifs de gestion d’urgence en lien avec les réseaux sociaux comme nouvel appui opérationnel ; et atelier de co-construction d’un observatoire participatif.
Cette journée était co-organisée par la Région et ses partenaires sur l’adaptation au changement climatique : AURA-EE, l’IRMA, le PARN et le CREA Mont-Blanc.
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