[ADAPTATION] Grenoble-Alpes Métropole : Mobilisation des acteurs de territoire et gestion des risques climatiques

La région alpine est sévèrement confrontée aux conséquences du changement climatique. Les aléas climatiques de plus en plus puissants et imprévisibles fragilisent la nature, les infrastructures et les individus. L’occurrence de risques naturels et les circonstances de leur survenue évoluent, bouleversant les modalités de gestion de crise. Comment mobiliser les citoyens et les élus afin de prévenir et de faire face ? Grenoble Alpes Métropole, en charge du Plan intercommunal de sauvegarde de l’agglomération, renforce son dispositif de mobilisation des communes autour de la gestion des risques climatiques. Au sein du collectif local « Risques et résilience », l'intercommunalité expérimente de nouvelles approches d’accompagnement des collectivités.

A propos du territoire

Le territoire Grenoble-Alpes Métropole est constitué de plaines, de coteaux et de montagnes. Il varie entre 200 et 2000 mètres d’altitude. Plus de la moitié de la superficie du territoire est soumise à au moins un risque naturel. Ces risques peuvent être hydrauliques (phénomènes torrentiels, inondations, crues rapides, ruissellement) ou gravitaires (chutes de blocs, glissements de terrains, affaissements de terrains, avalanches). Les séismes et les feux de forêts font aussi partie de la liste. « Un habitant sur deux soit 240 000 habitants vivent en zone d’aléa climatique », explique Bertrand Marion, chargé de mission à la Mission Risques de Grenoble-Alpes Métropole. « Et 200 000 d’entre eux sont exposés aux risques d’inondation. »

La Métropole, qui a créé une stratégie de résilience dès 2017 est soumise à l’obligation de mise en place d’un plan intercommunal de sauvegarde par la loi Matras de 2021. Mais elle souhaite aller plus loin. C’est pourquoi, à partir de 2023, elle propose aux communes d’entrer dans un nouveau dispositif de mutualisation de la connaissance, des outils et des retours d’expérience. Elle organise aussi exercices, animations et conférences en lien avec les acteurs de l’agglomération. Et elle cherche à faciliter la prise en compte de ces enjeux par les autres politiques comme celle de l’aménagement métropolitain.

Le territoire face au changement climatique

Les effets du changement climatique augmentent les risques, qui peuvent survenir en chaîne ou de manière concomitante. On parle alors de risques composés.

Des agents de terrain observent : « Ce que l’on connaissait une fois par carrière, on le vit maintenant trois fois par an.

Le 21 juin 2024, alors que qu’une réunion du réseau sur le thème du Plan d’Anticipation Gradué (PAG) est animée avec des élus de l’agglomération par les services de la Métropole, le Drac et la Romanche connaissent une crue importante, consécutive à de fortes précipitations.

« Nous vivions en direct ce que nous étions en train de mettre en place, à savoir nous structurer pour mieux répondre à une crise, en l’anticipant, en ciblant les décisions et les actions nécessaires avant les premiers débordements des rivières ». Un travail consigné dans les procédures de sauvegarde de la population du territoire mais devant surtout entrer dans les pratiques de chaque acteur pour assurer la leur résilience en cas de crise. « Toutes les communes ont vécu ensemble cet épisode d’inondation du Drac et de la Romanche, ce qui a créé une synergie », explique Bertrand Marion.

Cette culture du risque et de l’incertitude liée au changement climatique est au cœur du projet ADAPTNOW. Financé par le Fonds européen de développement régional (FEDER), dans le cadre du programme Interreg Espace Alpin, avec pour partenaires en région Auvergne-Rhône-Alpes Energie-Environnement (AURA-EE), l’INRAE et la Métropole de Grenoble, ADAPTNOW vise à soutenir les territoires alpins à haute vulnérabilité climatique en faisant évoluer des outils d’adaptation et des solutions participatives qui soient réplicables. Grâce au projet, la Métropole a pu financer un poste d’animateur « Risques » et lancer le dispositif « Risque et résilience ».

 

Le plan intercommunal de sauvegarde, relai entre prévention et gestion de crise

Le Plan InterCommunal de Sauvegarde (PICS) comme le Plan Communal de Sauvegarde (de la responsabilité du maire) sont des documents qui constituent une passerelle entre les politiques locales de prévention des risques et celles de gestion des situations de crise. Le PICS est de la responsabilité du président de l’EPCI qui doit assurer l’articulation avec les plans communaux de sauvegarde : il organise en particulier un appui à leur mise en place, à leur évaluation et aux leurs éventuelles révisions. 

En bref, le PICS facilite la solidarité entre les communes de l’agglomération. Il prévoit notamment des mesures pour :

  • Appréhender collectivement les fortes pluies automnales,
  • Faire face aux feux de forêts en montagne ; un phénomène nouveau nécessitant de réfléchir avec l’ONF sur la manière de débroussailler les forêts pour éviter les incendies sans fragiliser les forêts de protection qui tiennent les sols et qui sont efficaces contre les risques de chute de blocs de pierres,
  • Réaliser des mises en situation et des exercices à grande échelle afin de prendre les bonnes décisions sans panique, comme de fermer des voies sur berges, des pistes cyclables, des établissements recevant du public, des écoles, mettre en sécurité des habitants dont les maisons sont de plein pied.

Le collectif local « Risques et résilience », outil d’animation de la solidarité entre les communes

« Le maire est le premier concerné en cas de crise, il est le directeur des opérations de secours », explique Arthur Jolly, chargé d’études à la Mission Risque de Grenoble-Alpes Métropole. « C’est-à-dire qu’il est l’acteur responsable de la diffusion de l’alerte et de la sauvegarde de la population sur son territoire communal. »  Pour ce faire, il doit être en capacité d’identifier les risques, mais aussi de pouvoir faire de la prospective et de communiquer avec les citoyens.

L’enjeu est donc de faciliter l’interconnaissance des compétences et des personnes entre la Métropole en charge des risques et les communes, et de renforcer collectivement une culture du risque dans le contexte du changement climatique.

C’est pourquoi, la Métropole développe des outils de connaissance des risques et de la réglementation qu’elle diffuse et valorise dans le cadre du collectif « Risques et résilience ».

Grâce au projet ADAPTNOW des réunions ont permis de mobiliser les acteurs, élus et techniciens dans un réseau trans-partisan afin de faire face aux enjeux climatiques.

Le réseau s’est constitué en janvier 2023, après une première réunion en novembre 2022. 34 communes ont adhéré et chaque réunion a compté entre 20 et 30 personnes. La plus petite commune de la Métropole, Mont-Saint-Martin et ses 86 habitants, siège aux côtés de la plus peuplée, Echirolles et ses 40 000 habitants. « L’idée est de favoriser les échanges lors d’ateliers et de réunions thématiques pour faire groupe », explique Bertrand Marion.

C’est dans ce cadre que les différents outils développés par la Métropole sont diffusés et valorisés :

  • Une application cartographique pour visualiser les risques et la vulnérabilité du territoire métropolitain
  • Un guide métropolitain de l’aménagement résilient,
  • Un outil d’anticipation de la crise dit, plan d’anticipation gradué, où les actions sont mises en perspective selon les possibilités d’anticipation. « Dans le cas de risques de crue torrentielle ou par défaillance d’endiguement, par exemple, il faut essayer d’anticiper un jour avant. Un maire peut décider de fermer l’école, d’inciter les habitants à faire du télétravail pour éviter les déplacements ».  ...

Le groupe a par exemple discuté de la question de la mobilisation des citoyens autour des obligations légales de débroussaillement, des outils de mobilisation autour des risques à disposition en fonction des publics… Il a aussi été proposé aux communes de tester ClimaSTORY®, support d’animation d’une réflexion collective sur l’adaptation au changement climatique. « Les conseils sont mis en commun, les solutions pour protéger la population également », explique Arthur Jolly. 

« Des mises à jour du document communal sur les risques majeurs ont été faites../... Cela se fait tous les 5 ans, certaines communes l’avaient déjà fait, elles ont pu partager leur expérience, recenser leurs besoins ».

Bilan et perspectives

Au-delà de la solidarité locale, ce sont aussi des partenariats entre collectivités et des échanges que facilitent le projet ADAPTNOW. Par exemple, un partenariat entre Grenoble-Alpes Métropole et la Métropole Nice Côte-d’Azur s’est mis en place et entre Grenoble-Alpes Métropole et la Métropole de Lyon et la Ville de Gênes, en Italie. « Gênes a opté pour un protocole d’anticipation gradué des risques », précise Bertrand Marion.  D’autres réseaux existent, comme celui animé par le Pôle Alpin des Risques Naturels, dont fait partie la Métropole, sur la gestion intégrée des risques naturels.   

Ainsi, les réseaux « Risques et résilience » se constituent à l’échelon local, régional et international. ADAPTNOW et d’autres projets européens comme X-RISK-CC - dans lequel AURA-EE est également impliqué, autour de la problématique des risques extrêmes -, s’inscrivent dans la dynamique de coopération entre les régions alpines initiée lors de la Présidence française de la Stratégie de l’Union européenne pour la région alpine (SUERA), en octobre 2020, à Chamonix, lors de la Conférence « Climat, risques, énergie ».